NOUVELLES NATURE et AUTRES BREVES

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GUILLAUME LE CONQUERANT

Mathilde est prof d'histoire à Bayeux. Aussi bizarre que cela puisse paraitre, elle n'a jamais vu la célèbre tapisserie qui se trouve pourtant à deux pas de chez elle. Alors qu'un de ses collègues lui fait remarquer que c'est presque une faute professionnelle, elle se décide enfin à pousser la porte du musée le plus connu de Normandie.

 

Bien sûr elle connait par coeur l'épopée de Guillaume telle que brodée, il y a près de 1.000 ans, par son épouse mais c'est une chose d'en voir des reproductions et une autre de découvrir l'oeuvre originale. Une scène en particulier attire son attention, celle où l'on voit Guillaume s'entretenir au milieu du camp de Saint Valéry en Caux avec ses deux frères, Odon, évêque de Bayeux et Robert, comte de Mortain. Elle imagine leur conversation.

 

- Guillaume, ça fait un mois et demi que nous sommes ici à attendre des vents favorables pour traverser la Manche. Nos hommes sont fatigués d'attendre.

 

- Je sais, mais si nous attaquons Harold maintenant, nous avons peu de chance de le vaincre. Mes espions m'ont informé que Harald de Norvège va attaquer par le nord. Nous devons attendre qu'il passe à l'offensive avant de nous lancer, ainsi nous aurons la voie libre pour envahir l'Angleterre.

 

- Nous ferions mieux de prendre Paris. Le roi Philippe Capet n'a que 14 ans. Il ne nous opposera guère de résistance. Paris vaut bien Londres.

 

- Donnez-moi encore quinze jours.

 

Trois semaines plus tard, alors que certains compagnons d'armes de Guillaume menaçaient de retourner sur leurs terres, Le Conquérant décida de marcher sur la capitale du royaume de France.

 

- Nous nous diviserons en 3 groupes. Toi Odon, tu attaqueras par le nord et toi Robert, par le sud pendant que je remonterai la Seine avec notre flotte comme l'ont fait nos ancêtres vikings il y a bien longtemps.

 

Les opérations furent plus compliquées que prévu car si Guillaume avait des espions à sa solde, Philippe avait aussi les siens et les Normands furent contraints de livrer bataille bien avant d'arriver à Paris, attendus qu'ils étaient par les Français. Ils étaient certes mieux armés et plus expérimentés mais l'armée française possédait l'avantage de jouer sur son terrain. Les combats furent âpres et leur issue incertaine mais peu importe la manière pourvu que l'on remporte la victoire.

 

Fort de son succès, Guillaume transforma le royaume capétien en duché féodal et se fit couronner roi de Normandie dans l'Abbaye aux Hommes de Caen le 25 décembre 1066. Le duché de France conserva une large autonomie jusqu'en 1204, date à laquelle il fut rattaché au royaume de Normandie.

 

 

Au plan linguistique, le normand mit du temps à s'imposer. Par l'ordonnance de 1539, il fut promulgué langue exclusive de la justice et de l'administration mais ne devint officiellement langue officielle qu'en 1790. Langue officielle ou pas, le normand n'était parlé par le petit peuple que dans les limites de l'ancien duché, et encore sous de multiples variantes qui faisaient qu'un Bas Normand du Cotentin ne comprenait pas un Haut Normand du Pays de Caux et vice versa. Le normand ne parvint à s'imposer nationalement qu'après la loi de 1882 sur l'éducation obligatoire. Le normand devint alors l'unique langue d'enseignement et les enfants surpris à parler leur langue maternelle dans l'enceinte scolaire en Bretagne, en Occitanie ou en France, étaient punis "pour leur bien". A partir de ce moment, toutes les langues parlées sur le territoire national, autres que le normand, furent reléguées au rang de patois.

 

Plongée dans ses réflexions sur l'histoire de la langue normande, Mathilde n'entend pas la sonnerie qui annonce la fermeture du musée de la tapisserie de Bayeux et le gardien doit intervenir pour lui demander de sortir. Elle arrive chez elle juste à temps pour la fin du journal télévisé de 20 h.

 

-  En bref pour terminer, le parlement, réuni en congrès à l'Abbaye aux Hommes, s'est une fois de plus opposé à la ratification de la charte européenne des langues minoritaires que le gouvernement normand avait pourtant signée il y a plus de 15 ans, le 7 mai 1999. A ce jour, 25 pays européens ont signé et ratifié la charte.

 

Yann-Ber

 

le sénat rétropédale



29/11/2019
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